Le divorce d'un couple entraîne de nombreuses conséquences, tant patrimoniales qu'extrapatrimoniales, qui touchent autant les anciens époux que leurs enfants. Dans cette situation, la question des enfants est centrale, puisqu'il faut notamment déterminer leur nouvelle résidence. En principe, la séparation des parents n'a aucune incidence sur l'exercice de l'autorité parentale, chacun d'eux doit maintenir des relations personnelles avec les enfants, tout en respectant les liens que ces derniers entretiennent avec l'autre parent (article 373-2 alinéa 1 et 2 du Code civil). Ce maintien de l'exercice en commun de l'autorité parentale nécessite de déterminer la résidence des enfants. Celle-ci peut être fixée au domicile de l'un des parents ou en alternance entre le domicile de l'un et l'autre (article 373-2-9 alinéa 1er du Code civil). Ce choix peut être effectué par les parents ou, en cas de désaccord, par le juge aux affaires familiales. En tout état de cause, ce choix de résidence et les modalités en découlant devront être effectués « en veillant spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs » (article 373-2-6 du Code civil). Toute la question est alors de déterminer quel est l'intérêt des enfants au cœur du divorce de leurs parents.
Sachant que le fait de conserver des relations personnelles avec chacun de ses parents est un droit de l'enfant (CIDE, art. 10, § 2. – Charte européenne des droits de l'homme, art. 24, § 3), il serait de l'intérêt de celui-ci de continuer d'être élevé par ses deux parents. D'où une certaine prévalence de la résidence alternée. Mais est-il de l'intérêt des enfants de privilégier à tout prix le maintien des liens avec leurs parents, quitte à entraîner la séparation d'une fratrie lors de certaines vacances scolaires ?
En l'espèce, le divorce a été prononcé aux torts exclusifs de l'ex-mari. Les modalités exactes du jugement de première instance ne sont pas connues. L'ex-mari a interjeté appel devant la cour d'appel de Versailles. Celle-ci a réglé les conséquences du divorce, en prévoyant notamment le versement d'une prestation compensatoire à hauteur de 40 000 euros et d'une pension alimentaire de 300 euros en faveur de l'ex-épouse, ainsi que l'organisation des modalités de résidence des enfants. La résidence des deux enfants a été alternativement fixée au domicile de l'un et l'autre des anciens époux, afin de permettre à chacun des parents de passer du temps avec les deux enfants réunis.
L'ex-mari a formé un pourvoi devant la Cour de cassation. En plus de contester le montant de la prestation compensatoire et le versement de la pension alimentaire, il regrette que les modalités prévues, quant à la résidence des enfants, entraînent une séparation de la fratrie lors de certaines vacances scolaires. En effet, les enfants sont scolarisés dans des établissements dépendant de deux zones différentes. Lors des vacances d'hiver et de printemps, ils n'ont qu'une semaine de vacances en commun. Or, le fait de maintenir la résidence alternée telle que définie par le juge d'appel entraîne la séparation de la fratrie lors de ces deux périodes de vacances.
S'il est vrai que « l'enfant ne doit pas être séparé de ses frères et sœurs », une telle séparation est envisageable si l'unité de la fratrie est impossible à maintenir ou lorsque l'intérêt de l'enfant le commande (article 371-5 du Code civil). En l’espèce, rien ne permettait de considérer que l'intérêt des enfants commandait de les séparer. Tout reposerait alors sur l'impossibilité de maintenir l'unité de la fratrie. La scolarisation des enfants, dans des établissements dépendant de deux zones différentes, était-elle de nature à empêcher l'unité de la fratrie lors de certaines vacances scolaires ? Les juges d'appel n'ont pas répondu à cette question, alors même que le père avait proposé d'accueillir chez lui ses deux enfants lors de leur semaine de vacances en commun, afin que la fratrie soit réunie.
La Cour de cassation (Cass. 1re civ., 14 oct. 2020 pourvoi n° 19-18.100) écarte les moyens relatifs au montant de la prestation compensatoire et au versement de la pension alimentaire. Quant aux modalités de résidence, si la Cour ne dit pas expressément qu'une telle solution porte atteinte aux intérêts des enfants, le visa est révélateur de sa position. Il est de l'intérêt des enfants de maintenir des liens avec leurs parents, mais jamais au détriment de l'unité de la fratrie.
Lorsque le juge organise les modalités de résidence alternée, il doit veiller à sauvegarder l'unité de la fratrie.
En conclusion, l'intérêt des enfants n'est pas sauvegardé lorsque les modalités de résidence alternée empêchent une fratrie d'être réunie lors de certaines vacances scolaires.