Parmi les 25 ordonnances publiées au JO du 26 mars 2020, un texte concerne les conditions financières de résolution de certains contrats de voyages touristiques et de séjours en cas de circonstances exceptionnelles et inévitables ou de force majeure. Il est pris en application de la loi d'urgence pour faire face au Covid-19 qui habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures qui relèvent du domaine de la loi (L. n° 2020-290, 23 mars 2020).
Cette ordonnance (Ord. n° 2020-315, 25 mars 2020 modifie les obligations des professionnels du tourisme, organisateur ou détaillant, pour leur permettre de proposer à leurs clients, pour une période déterminée et limitée dans le temps, un remboursement de leur voyage ou séjour sous la forme d’une proposition de prestation identique ou équivalente, ou sous la forme d’un avoir valable 18 mois.
Ces nouvelles modalités de remboursement s’appliqueront aux résolutions de contrat notifiées soit par le client, soit par le professionnel ou l’association du 1er mars au 15 septembre 2020 inclus.
La mise en place d’un avoir à la place d’un remboursement doit permettre « d’équilibrer le soutien aux entreprises du secteur en cette période de crise avec le respect du droit des consommateurs » précise le rapport du Premier Ministre au Président de la République.
Les prestations concernées par cette mesure :
- Tous les voyages à forfait, c’est-à-dire les prestations incluant un vol et au moins une nuitée ou bien des prestations incluant au moins un service de voyage (avion, hôtel…) et des « services touristiques » (par exemple des visites guidées, des activités sportives ou de loisir…) lorsque ces derniers constituent une part significative (25%) de l’ensemble du forfait ou en sont une caractéristique essentielle. Les voyages scolaires ou linguistiques sont également concernés.
Jusqu’à présent, le Code du tourisme imposait aux voyagistes de procéder au remboursement intégral des sommes versées lorsqu’ils annulaient un voyage à forfait (article L. 211-14 III 2°) ou lorsque ce voyage était annulé par le client en cas de « circonstances exceptionnelles et inévitables ayant des conséquences importantes sur l’exécution du contrat ou sur le transport des passagers vers le lieu de destination » (Article L. 211-14 II) ;
- La location de voiture, les hébergements touristiques (hôtels, locations saisonnières, campings…) et « tout autre service touristique ». Cette dernière notion couvre de nombreuses prestations. Un certain nombre d’entre elles sont définies dans la directive européenne 2015/2302 du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées :
- Concerts,
- Manifestations sportives,
- Excursions,
- Parcs à thèmes,
- Visites guidées,
- Forfaits pour les remontées mécaniques,
- Location d’équipements sportifs tels que le matériel de ski,
- Soins en spa.
Cette liste n’étant pas exhaustive.
Les prestations non concernées par cette mesure :
- Les vols secs achetés sans autre prestation. Les consommateurs ont le droit de réclamer le remboursement intégral de leur billet lorsque celui-ci a été annulé par la compagnie, conformément au règlement européen 261/2004.
- Les voyages en train, bus ou ferries. Les consommateurs ont le droit de réclamer le remboursement intégral de leur billet lorsque celui-ci a été annulé par la compagnie. C’est ce que rappelle la Commission européenne dans ses lignes directrices publiées le 18 mars 2020.
- Les « services touristiques » réservés à l’étranger puisque c’est la réglementation locale qui s’applique.
- Tous les séjours touristiques annulés avant le 1er mars 2020. Dans ce cas précis, la réglementation « classique » du Code du tourisme s’applique.
Les modalités de cet avoir :
Les sommes d’ores et déjà versées sont conservés par le professionnel. Celui-ci va alors proposer à ses clients de les utiliser sous forme d’un avoir pour une nouvelle prestation identique ou équivalente dans les 18 mois à venir.
Le tarif du nouveau voyage ou de l’activité touristique (location de voiture, concert, forfait ski…) ne doit pas dépasser celui de l’ancien. Toutefois, les consommateurs seront peut-être amenés à payer des frais supplémentaires lorsque le contrat initial annulé prévoyait déjà une majoration possible (par exemple, pour les voyages à forfait, la hausse des frais de kérosène pour le vol).
Cet avoir est sécable, c’est-à-dire qu’il peut être utilisé en plusieurs fois pour plusieurs prestations.
Il est possible de demander de bénéficier d’une prestation de catégorie supérieure à la prestation initial mais, dans cette hypothèse, la différence de tarif sera à la charge du consommateur.
Démarches à accomplir :
Le professionnel doit informer son client qu’il peut bénéficier d’un avoir via un courrier ou par mail qui doit être adressé dans les 30 jours suivant l’annulation du voyage (ou 30 jours à compter du 26 mars, jour de publication de l’ordonnance si le voyage a été annulé avant).
Le professionnel aura ensuite trois mois suivant l’annulation initiale pour adresser à son client une nouvelle offre (ou devis ou contrat) identique ou équivalente à celle qui a été annulée. Le client est libre d’accepter ou non, voire de ne pas répondre.
Si le client accepte l’offre : un nouveau contrat sera signé dans lequel sera notamment précisé la date de versement du solde, si seul un acompte avait été versé.
Si le client refuse la proposition : le professionnel pourra proposer à son client d’autres offres plus en adéquation avec leurs souhaits.
Si aucune offre faite n’intéresse le client : le client sera alors en droit de récupérer les sommes versées à l’issue du délai de 18 mois.
Les professionnels pourraient procéder à un remboursement avant le terme des 18 mois lorsque les clients ont des difficultés financières et dans la mesure des possibilités. Une formulation qui laisse une grande marge d’appréciation aux voyagistes, d’autant que rien n’est prévu dans l’ordonnance pour ce type de situation.