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Quels sont les droits et les devoirs des parents séparés à l’heure du coronavirus ?

Le 24 mars 2020
Quels sont les droits et les devoirs des parents séparés à l’heure du coronavirus ?

L’épidémie de COVID-19 a amené les pouvoirs publics à prendre des mesures sanitaires drastiques afin de ralentir le développement de la maladie. Parmi ces mesures, il y a la limitation des déplacements au strict nécessaire ou à ce qui est inévitable, la fermeture de tous les lieux recevant du public dont le fonctionnement n’est pas nécessaire à la vie de la Nation, et des mesures de confinement.

Toutes ces mesures peuvent avoir des conséquences pour les parents séparés et il n’est pas inutile de s’interroger avec eux sur la meilleure conduite à tenir :

L’autorité parentale :

L’autorité parentale est un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant. Son exercice est partagé entre les deux parents. Rien ne justifie d’en modifier l’exercice et les modalités.

Ainsi, au regard du contexte actuel, l’autorité parentale conjointe implique en ces circonstances exceptionnelles de :

– demander l’accord de l’autre parent avant toute activité extérieure des enfants ;

– avertir l’autre parent, non gardien, de l’évolution de l’état de santé des enfants, en s’assurant que les carnets de santé suivent les transferts des enfants s’ils ont lieu ;

– tenir informé l’autre parent du suivi scolaire des enfants et des éventuelles difficultés rencontrées à ce titre.


La résidence des enfants est fixée chez un parent à titre principal :

À l’exception de l’hypothèse où une interdiction totale de circuler interviendrait pendant l’exercice régulier d’un droit de visite et d’hébergement de l’autre parent, les enfants ont vocation à se maintenir chez le parent chez qui la résidence est fixée, sans voyager, être déplacés, cherchés puis ramenés.

L’exercice du droit de visite et d’hébergement qui, dans l’intérêt des enfants, leur permet de maintenir un lien avec l’autre parent se confronte en effet à un impératif de santé publique de distanciation sociale et de très stricte limitation des déplacements. On peut estimer cohérent que cet exercice soit exceptionnellement suspendu dans une situation impliquant des déplacements en transports en commun ou réorganisés de manière inhabituelle.

Des trajets de quelques rues d’un cheminement qu’on peut effectuer à pied avec les enfants ou en voiture dans la même agglomération ne pose en l’état pas de difficulté. À l’inverse, il ne sera plus envisagé de faire effectuer, quelle que soit la distance, des déplacements en transports publics aux enfants ou avec les enfants, ni de leur imposer à tout prix des trajets trop longs. Pour les parents géographiquement éloignés, l’intérêt des enfants implique d’éviter des trajets et la fatigue qui peut en découler, leur exposition à des zones sanitaires plus sensibles, et la recherche alternative d’un lieu d’accueil ponctuel qui n’offrirait pas toutes les garanties sanitaires.

Si un confinement total devait être imposé, on peut imaginer que même un droit de visite et d’hébergement à proximité immédiate sera suspendu au regard des consignes sanitaires.

Le parent qui bénéficie de la résidence devra être attentif à maintenir des liens réguliers avec l’autre parent selon tous les moyens de communication à sa disposition et le cas échéant fixer des rendez-vous pour en assurer l’effectivité.

Dans l’hypothèse où les relations parentales sont conflictuelles, il sera nécessairement conservé une trace des échanges qui ont pu se tenir afin de modifier le droit de visite et d’hébergement, le suspendre, le réorganiser, récapituler les accords intervenus. Tout moyen de communication est valable : courrier électronique, SMS, message WhatsApp…tant qu’on en conserve une trace.


La résidence des enfants est alternée :

 Les deux parents sont référents et se partagent en général le temps de résidence dans un cadre géographique de proximité immédiate. Aucun des deux parents ne peut évidemment primer sur l’autre.

Compte tenu de l’habituelle contiguïté géographique des domiciles parentaux, on peut imaginer des transferts aisés des enfants dans le respect des règles sanitaires. Il ne serait pas inopportun de modifier néanmoins la fréquence desdits transferts pour les raréfier (tous les 15 jours au lieu de toutes les semaines, se diviser par moitié une période de confinement…).


La résidence des enfants n’est pas (encore) fixée judiciairement :

Il est rappelé que dans cette hypothèse, les droits des deux parents sont équivalents. Il convient donc de se conformer à la pratique habituellement exercée puisqu’il sera extraordinairement difficile d’obtenir dans l’extrême urgence une décision de justice, la priorité étant sans aucun doute réservée aux situations présentant une forme de gravité.

Si la pratique habituelle n’est pas suivie pour des raisons discutables, il pourrait être démontré une volonté de ne pas respecter les droits de l’autre parent au sens de l’article 373-2-11 3° du Code civil, situation ultérieurement sanctionnable par le juge.

Le droit de visite et/ou d’hébergement des grands-parents fixés judiciairement. En fonction de l’âge des grands-parents et compte-tenu des instructions sanitaires des pouvoirs publics, il paraît plus sage de suspendre la mise en place de celui-ci.

Néanmoins, il est préférable de maintenir le lien entre les enfants et les grands-parents, ce qui est l’objectif du droit de visite et d’hébergement, par tous moyens de communication et le cas échéant de fixer des rendez-vous pour en assurer l’effectivité.

Les parents suspendant l’exercice du droit de visite et d’hébergement conserveront les justificatifs des communications entre les enfants et les grands–parents. Inversement, les grands-parents qui n’auraient plus de lien avec leurs petits–enfants conserveront les justificatifs de leurs demandes d’appels téléphoniques, Skype, Attrape…


La contribution à l’entretien et l’éducation des enfants :

La contribution prend habituellement la forme d’une pension alimentaire qui est une dette alimentaire. Elle est prioritaire sur toutes les autres dettes et engagements financiers. Elle doit être versée en priorité dans les délais fixés.

 Il en est de même, d’ailleurs, pour les autres dettes à caractère alimentaire : le devoir de secours, la prestation compensatoire, les subsides…

Les sanctions à l’absence de versement sont nombreuses, à caractère civil et pénal : la procédure de paiement direct, la saisie des rémunérations, le recouvrement par le Trésor public de la pension, l’intervention de l’organisme débiteur de prestations familiales, le délit d’abandon de famille.

Pour autant, et en situation d’impossibilité absolue de versement, le débiteur de la pension informera le créancier du non-respect de ses obligations, ce dont il justifiera en communiquant de manière transparente le plus d’éléments à sa disposition, par lettre recommandée avec accusé de réception (le cas échéant sous la forme d’un AR24, c’est-à-dire par lettre recommandée électronique avec accusé de réception).


Les autres situations :

Les médiations en cours peuvent se maintenir et continuer par visioconférence.

 Les instances en cours vont voir leur calendrier modifié et réorganisé puisque les tribunaux sont fermés sauf en cas de situation d’urgence.

Les divorces consensuels peuvent continuer à être élaborés. Seule la signature finale de la convention de divorce sous la forme d’un acte d’avocat nécessitant la présence réunie des avocats et des parties, le cas échéant du notaire rédacteur de l’acte liquidatif du régime matrimonial, sera repoussée, n’empêchant cependant pas de notifier dès à présent les conventions de divorce permettant de déclencher le délai de réflexion impératif de 15 jours.

 

Source : Petit vade-mecum des parents séparés face à la crise du coronavirus - Par Guillaume Barbe, et Raluca Lolev, Avocats - Gazette du palais